A l'occasion du centenaire celebrant la fin de la premiere guerre mondiale, l’agenda Présidentiel se sera vu inscrit, la journée du 11 Novembre 2018, les commémorations de l’armistice. A l'heure où les derniers survivants des tranchés trépassent, l'Etat perpétue un devoir de mémoire, sensible à la lente érosion du temps qui passe. Or, puisque l'administration post-Mittérandienne n'a jamais subie elle-même les sévisses de la guerre, peut-elle vraiment percevoir les véritables enjeux du passé? A nos yeux, une paix éternellement acquise, proviendrait-elle du souvenir ou de l'oubli? Dès lors que l'Etat honorait ce qui est advenu que par principe, il est prégnant d'en examiner la légitimité.
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La notion de commémoration du passé - placée sous l'égide de l’état - renvoie à tout événement, voulu, mis en scène puis, exécuté par une administration publique. La commémoration vise à promouvoir et à honorer l'histoire qui illustre un pays et par extension, ses citoyens. Verser l'acte particulier dans la reconnaissance collective, dilate l'écoulement des années jusqu'à rendre le destin accessible à la postérité. Aussi, il faudra se limiter ici à l'hypothèse dans laquelle l' Etat est exempt de défiance politique – i.e Les Gilets jaunes – afin de parvenir à soustraire le rejet de l'autorité par la population, de la problématique posée par la question de la légitimité de l'Etat à célébrer le passé.
Historiquement, le culte est le stade précoce de la propagande politique. L’époque expansionniste Romaine est marquée par les celebrations du Sol invictus qui assure chaque 25 Décembre, une tribune de choix au Sénat. L'école stoïcienne martèle que " tout n'est pas politique, mais que la politique s’intéresse à tout ". Plus tard, la chute des rites politéistes succombant au Christianisme, n’étamera jamais que la forme des commémorations. Pas le fond. En France, entre 1789 à l'instauration de la Vieme République, l'Etat se départi du pouvoir ecclésiastique pour adopter un régime constitutionnel ( art 5 Constitution de 1958 ). Il en résulte que l'autorité publique reconnait la souveraineté d'un peuple laïque et s'adosse à la raison d'Etat pour fonder une mythologie républicaine. Désormais, si les croyances relèvent de la sphère personnelle, la vérité appartient au domaine public. La commémoration incontestable, elle ambitionne d' incarner la vérité.
Toutefois, lorsque l'autorité choisie d'honorer un fait, elle narre une interpretation de la vérité. Elle révèle ce qu'elle est, pas ce qui est. En effet, opérer un choix historique, c'est exclure une fraction de la vérité afin de servir un propos. Gouverner en démocratie est consubstantiellement clivant dans une société protéiforme pétrie d'égalité. A cet égard, la gestion de l'espace public réputé laïque ne peut que diviser. L'affaire dite des creches de Noel en est l'illustration. En l'espèce, le Conseil d’Etat a du s'enquérir de questions d’ordres épistémologiques avant de pouvoir être à meme de transiger sur l'usage de coutumes judéo-chrétiennes. C'est dire si les commémorations dévolues à s’imposer dans l'espace public sont à observer avec acuité sitôt que l'Etat entend fédérer et non, abolir.
Alors, il convient de se demander dans quelle mesure l’Etat doit s’investir dans la mémoire collective car la réponse à cette question, jauge de l'emprise réelle des institutions sur son époque. Il s'agit du véritable theme soulevé par les commémorations du passé.
Autrement dit, pour les subjectivistes, l' administration à même de contrôler le présent, occupera le passé pour mieux préparer l'avenir ( I ), tandis que l' Etat défaillant s'appropriera le passé pour mieux gouverner le présent ( II ).