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Le consentement est l’acquiescement, tacite ou exprès donné à un acte. S'il fait l'objet d'une protection particulière en droit civil par la théorie des vices de consentement permettant l'annulation d'un acte juridique, rien n'est moins sûr en droit pénal. Le droit correspond à l'ensemble des règles ayant pour objet d'ériger certains comportements infractionnels et de les réprimer. Cette répression s'appuie sur la volonté de protéger certaines valeurs sociétales en punissant ceux qui y porteraient atteinte. Ainsi, c'est l'atteinte à la valeur qui est punie plus que l'atteinte. C'est pourquoi le consentement de la victime à la commission de l'infraction est a priori indifferent à la répression, en ce qu'il ne peut constituer une justification de l'infraction. De meme, la répression des comportements prohibés suppose, par définition, le recours à la contrainte à l'encontre de l'agent, son consentement aux procedures d'enquête et de jugement est donc, de la meme façon, indifferent.
Toutefois, cette apparente indifférence du droit pénal pour le consentement ne résiste pas longtemps à un examen plus poussé. En effet, d'une part, l'étude du droit pénal spécial met en lumière l'existence d'infractions pour lesquelles l'absence ou la contrainte du consentement sont érigées en element constitutif ( vol, extorsion ). D'autre part, l'étude de la procédure pénale permet de redonner une place au consentement exigible pour la réalisation de certains actes d’enquête, de poursuites ou bien encore, pour l'execution de certaines peines.
Le consentement ne peut donc être considéré comme une simple circonstance de fait, insignifiante en droit. Il occupe une place prépondérante dans le débat public actuel. On peut ainsi citer la question sensible de la fin de vie. Le consentement de la personne mourante occupe une place centrale dans la qualification d'homicide.
La question de la place du consentement en droit penal emporte donc des enjeux techniques. Ainsi, par-delà l'apparente indifference du droit pénal pour le consentement ( I ), perdure une réelle préhension ( II ).
I. L'apparente indifférence du droit pénal pour le consentement
De prime abord, le droit pénal apparaît indifférent au consentement de la victime ( A ), tout comme celui de l'agent, auteur soupçonné ou avéré de l'infraction ( B ).
A. L'indifférence nuancée pour le consentement de la victime
Le consentement de la victime à la commission de l'infraction ne saurait a priori, l'excuser ( 1 ). Cette affirmation doit toutefois être nuancée eu égard à la prise en compte du libre arbitre des individus ( 2 ).
1.L'absence d'excuse de l'infraction consentie
Le droit pénal a pour objet de réprimer les atteintes aux valeurs sociales protégées ; à ce titre, c'est le ministre public, représentant les intérêts de la société en poursuivant le coupable et non, la victime. Ainsi, un comportement infractionnel, qui aurait été consenti par la victime, demeure une atteinte à l'ordre social et justifie qu'il soit tout de même poursuivi. Le consentement donné par la victime à l'atteinte de sa personne ne peut donc excuser l'infraction et faire obstacle à la mise en oeuvre de la responsabilité pénale de l'argent. Une telle solution a été reconnue trop tôt par la jurisprudence qui a affirmé qu'un homicide commis à 2, tombe sous la loi pénale réprimant l'homicide volontaire ( Ch.réunies, 15 Dec.1837 ). Pour des faits pouvant recevoir une application plus contemporaine, la cour de cassation a pu décidé que la circonstance d'une tentative de meurtre qui était le résultat du désir manifesté, par celui, contre lequel cette tentative a eu lieu, ne constitue pas une excuse, mais ne peut seulement être considéré comme une circonstance atténuante ( Crim. 21 Août 1851 ). Cette solution, s'agissant du consentement à l'homicide, accueille une large réflexion en matière d'euthanasie. En effet, si en France l'euthanasie passive a été légalisée, tel n'est pas le cas de l'euthanasie active consistant en l'injection, par le médecin, d'une substance létale. Cette pratique constitue, en 2018, un homicide volontaire, meme si le patient en fait la demande. La poursuite de ce comportement est possible du point de vue des droits fondamentaux, aucun droit à mourir n’étant consacré ( CEDH Pretty vs RV,2002 ) et les Etats-membres disposant d'une large marge d'appréciation ( CEDH Hass vs Suisse, 2011).
Cependant, l'influence des droits fondamentaux, sous l'égide de la Cour européenne des droits de l'homme, a creusé une brèche dans le principe de l'indifférence au consentement de la victime.
2. L'efficacité du consentement du point de vue des droits fondamentaux
Si le consentement de la victime à la perpetration d'un homicide à son encontre est indifférent à la repression, tel est également le cas en matière de violences volontaires. Ce principe renvoie aux pratiques sadomasochistes qui demeurent des violences consenties entre partenaires sexuels. La CEDH s'est emparée de la question dans le celebre arrêt KA et AD vs Belgique du 17 février 2008 où deux requérants étaient poursuivis pour violences volontaires commises à l'occasion d'un coïte. La cour a alors estimer, sur le fondement de l'art.8 de convention protégeant le droit à la vie privée, que " le droit penal ne peut, en principe, intervenir dans le domaine des pratiques sexuelles consenties qui relèvent du libre arbitres des individus ". L'ingérence des pouvoirs publics dans ce domaine ne peut être justifier que pour des raisons particulièrement graves, ce qui était le cas en l'espèce, la victime ayant retirée son consentement de manière claire, alors l'un des requérants avait passé outre en lui infligeant des blessures graves. La portée de cette affaire est grande ; les relations consenties, meme violentes, ne peuvent faire l'objet de poursuites pénales, celle-ci relevant de la liberté sexuelle protégée par l'art.8. Cette protection rigoriste des droits fondamentaux par la CEDH ouvre une brèche dans l'indifférence du droit penal pour le consentement de la victime. Au-delà, le droit penal reste indifferent a consentement de l'agent.
B. L'indifférence évidente pour le consentement de l'agent
L'indifférence du droit penal pour le consentement de l'agent apparaît dans la coercition. Cette contrainte se justifie dans un souci d'efficacité pénale (1) et sa punition (2 ).
1.Absence de consentement dans la poursuite des infractions
La phase d’enquête se farde du pouvoir de contrainte afin d'assurer l'effectivité de la recherche d'elements constitutifs de l'infraction. L'agent soupçonné ne peut faire entrave à la procedure par la seule absence de son consentement aux actes d’enquêtes. Ainsi, dans le cadre de la flagrance, c'est à dire en cas de crime ou de délit puni d'une peine d'emprisonnement qui se commet actuellement ou qui vient de se commettre ( art. 53 CPP ), l'OPJ peut procéder à des perquisitions domiciliaires qui ne nécessitent pas l'assentiment de l’intéressé(e)(art.56 CPP ). De meme, quell que soit la forme de l’enquête, la personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis, ou tentée de commettre un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement peut faire l'objet d'une mesure de garde à vue ( art.62-2 CPP ). Cette disposition temporaire suppose l’affranchissement du consentement. Enfin, il est possible d'en déduire le meme raisonnement de la détention durant une mise en examen. Cette absence de consentement se retrouve au stade de la punition.
2. Absence de consentement dans la punition
Lorsque l'agent est déclaré coupable, la juridiction prononce la peine à exécuter ( amende, emprisonnement, réclusion.. ) comme mesure punitive, dissuasive et resocialisante d'un comportement prohibé. Si la peine peut être acceptée par le coupable, elle n'a pas à être consentie sauf à lui ôter toute expiation.
Le droit penal est ainsi manifestement indifferent au consentement de la victime et à celui de l'agent. En réalité, il subsiste de nombreux tempérament aux apparences.
II. La prise en compte avérée du consentement par le droit penal
Le consentement est pris en compte par le droit pénal, à la fois au stade de l'incrimination ( A ) et de la répression ( B )
A. La prise en compte du consentement au stade de l'incrimination
Le consentement est parfois prise en compte dans la définition meme des infractions. Ainsi, sont parfois érigés en element constitutif l'absence d'accord ( 1 ) et la contrainte de l'accord ( 2 ).
1.L'accord absence
Plusieurs infractions nécessitent que soit dénombrée l'absence de consentement de la victime pour que l'infraction soit constituée et donc que la responsabilité pénale puisse être engagée.
D'abord, l'absence de consentement est un élément constitutif du viol réprimé à l'art.222-23 CP qui puni de 15 ans de réclusion criminelle tout acte de penetration sexuelle, de quelque nature que ce soit, commis sur la personne d'autrui par violence, contrainte, menace ou surprise. Si le législateur n'affirme pas clairement que la victime ne doit pas être consentante de l'acte, c'est ce qui résulte de l'énoncé des moyens listés par les dispositions. Ainsi, le crime de viol consiste dans le fait d'abuser d'une personne contre sa volonté, soit que le défaut de consentement résulte de la violence physique ou morale exercée à son égard, soit qu'il résulte de tout autre moyen de contrainte ou de surprise pour atteindre, en dehors de la volonté de la victime, le but qui se propose l'auteur de l 'action ( crim 25 juin 1987 ). Ainsi, la décision d'accusation ( ordonnance ou arret ) doit énoncer clairement les elements contraignants exercés. L'absence de consentement comme element constitutif du viol fait en 2017 l'objet d'un débat au regard de l'age minimal en dessous duquel, le mineur ne serait pas à meme de faire valoir un consentement.
Ensuite, l'absence de consentement est un element constitutif du délit d'atteinte à la vie privée puni à l'art. 226-1 CP qui suppose l'enregistrement ou la retransmission de propos ou d'image sans le consentement de l'auteur des propos ou de la personne apparaissant sur l'image.
Enfin, on peut encore citer le délit d'interruption volontaire de grossesses sans le consentement de l’intéressée ( art.223-10 CP ) .
Certaines infractions supposent un consentement contraint.
2. L'accord contraint
Plusieurs infractions supposent, pour leur réalisation, que la victime ait consenti à un acte sous la contrainte ou par ruse.
D'abord, l'art.312-1 CP puni l'extorsion, à savoir le fait d'obtenir par violence, menace de violences ou contrainte, soit une signature, un engagement ou une renonciation, soit la révélation d'un secret, soit la remise de fonds ou d'un bien. Ici, l'agent a obligé à un acte particulier, l'extorsion est consommée quand la victime a procédé à l'acte, mais contre sa volonté. Le meme raisonnement peut être tenu à propos de l'abus de faiblesse ( art.223-15-2 CP ) où la victime, personne vulnérable, procede à un acte ou s'abstient, son jugement étant altéré par l'agent.
Ensuite, il peut être citer l'escroquerie réprimée par l'art.313-1 CP et consistant en le fait de tromper une personne, par des moyens énumérés, pour la déterminer à remettre une chose. Ici encore, e consentement de la victime a été trompé, elle a alors consentie à remettre la chose visée. Pour que l'escroquerie soit caractérisée doivent être établies les manœuvres frauduleuses. Le fait de contraindre le consentement de la victime est donc un element constitutif.
Si l'absence de consentement est parfois pris en compte au stade de l'incrimination, il trouve également une place au stade de la répression.
B. La prise en compte du consentement au stade la répression
Au stade de la répression, malgré la contrainte intrinsèque, le consentement de la personne soupçonnée ou coupable, est parfois retenu. Tel est le cas avant ( 1 ) et après ( 2 ) le jugement.
1.Le consentement de l'agent avant le jugement
Le consentement de l’intéressé peut être nécessaire au stade des investigations. En savoir plus
En premier lieu, dans le cadre de l’enquête préliminaire, une perquisition ne peut en principe être réalisée sans l'assentiment de la personne ( art.76 CPP ). Le consentement à la perquisition en est une condition de validité et doit être déclaré par écrit. Toutefois, ce principe est tempéré par des exceptions : une perquisition inquisitoire est possible sur autorisation du JLD pour un crime ou un délit puni d'au moins cinq ans ( al.4 de l' art.76 CPP ).
En second lieu, dans le cadre de l'instruction, la personne mise en examen peut faire l'objet d'une mesure restrictive de liberté en amont de son jugement. Elle peut être placée sous contrôle judiciaire, en détention provisoire ou encore, assignée à résidence avec surveillance électronique. Cette dernière mesure ne peut être décidée qu'avec l'accord de l’intéressé(e) ( art. 142-5 CPP ).
En dernier lieu, le procureur de la République dispose de plusieurs prérogatives préalables ou alternatives aux poursuites dont certaines requièrent le consentement de la victime ou de l'agent. Tel est le cas de la médiation, préalable aux poursuites, prévue par l'art.41-1 CPP nécessitant l'accord de la victime; de la transaction par OPJ ( art.41-1-1 CPP ) qui suppose une acceptation de l'agent, tout comme la composition pénale ( art. 41-2 CPP ) pour laquelle l'auteur des faits doit donner son acceptation.
2. Le consentement de l'argent au stade du jugement et de son execution
Tout d'abord, s'agissant du jugement, le procureur peut recourir à la procedure de CRPC régie par l'art. 495-7 CPP et suiv. Cette procedure suppose d'abord que la personne reconnaisse les faits qui lui sont reprochés. Ensuite, le procureur proposera une peine, dont le quantum est strictement encadré, que ladite personne, assistée de son avocat, est libre d'accepter ou non ( art.495-9 et 12 CPP aborgé en 2020). La peine proposée ne peut donc être prononcée que si le commettant y consent, sans quoi elle serait renvoyée devant le tribunal correctionnel.
Ensuite, certaines peines ne peuvent être prononcées qu'avec l'accord de l’intéressé(e) ; tel est le cas des travaux d’intérêt general ( art.131-8 CP ) ou le placement sous surveillance électronique ( art.132-26-1 CP abrogé en 2020)....
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